Quand on parle de l'" Exposition Universelle " de 1937, " Exposition Internationale des Arts et Techniques " de Paris, on évoque généralement les difficultés sociales qui faillirent en compromettre l'ouverture ou encore l'" affrontement " symbolique entre le pavillon de l'URSS et celui de l'Allemagne, avant de donner un inventaire finalement positif des apports de cette manifestation, mais on en occulte souvent le " clou " qui fut le " Cirque des Cirques ". Pourtant, bien qu'entre la parade et les représentations, les enthousiasmes se nuancèrent, il serait dommage d'oublier cette exceptionnelle mise en valeur des jeux de la pise. Le cadre choisi fut le " Grand Palais ". Le maître d'œuvre de l'idée et de la réalisation de la manifestation était l'écuyer Jean Houcke qui, comme il le dit lui-même au cours d'une interview au célèbre journaliste et poète du cirque, Serge: " Ce n'était pas une une petite affaire que de meubler un si vaste espace pourtant très artistiquement aménagé par l'architecte Madeline ". La formule adoptée, un compromis entre celle des hippodromes d'antan, notamment ceux de l'Alma et de la Place Clichy où déjà le patronyme Houcke avait brillé et le style " Barnum ", avec ses prestations simultanées. A côté de celui de Houcke, trois autres noms s'imposaient sur les affiches: Rancy, Baroncelli et Kavaljos.... Houcke et Rancy bien connus des spectateurs de cirque, et raison d'être de cet article, le Marquis de Baroncelli justement célèbre chez les gardiens de Camargue, et Kavaljos, réplique hollandaise de notre Molier national. Ce quadruple parrainage indique la place prépondérante occupée par le cheval dans le programme. Plus d'une centaine d'équidés peuplaient les écuries, et, après un défilé particulièrement copieux réunissant artistes, cavaliers et montures, c'était en effet une succession de numéros équestres qui, séparément ou ensemble, animaient en priorité les pistes: Gilbert Houcke et sa sœur Nadia faisaient assaut de voltige, leur frère Maurice, Madame Richardson et Adolphe Van Holste, du " Cirque Kavaljos ", assuraient le dressage avec des groupes plus ou moins importants, Gilbert Houcke affrontait André Rancy ressuscitant les joutes romaines, le Marquis de Baroncelli et le Capitaine Alphonse Arnaud menaient quinze cavaliers et cavalières, reconstituant des jeux de Camargue, puis les écuyers du cirque d'amateurs Kavaljos présentaient une élégante " Symphonie en Blanc ". Il y avait aussi , grand moment, une course de chars: trois quadriges drivés par André Rancy, Maurice et Gilbert Houcke. en plus de toutes ces cavaleries, celle de Carré étant disponible à la suite de l'arrêt du " Médrano " voyageur, vint corser les dernières représentations. En marge de cette omniprésence de chevaux, l'autre pole attractif du programme se plaçait au ciel de ce " Cirque des Cirques " où se rencontraient, dans une vertigineuse gestuelle aérienne, les volants Algévols et Maxims avec Suzanne Riom (Joan Tanya), les deux Salagur, Margaret Jardys, les soeurs Mandos, et aussi un fascinant " casse-cou ", " The Great Federico" qui, accroché par la mâchoire à une corde tout en haut sous la verrière, se lançait soudain dans un balancement inoui pour traverser l'immense salle, vision brève mas fantastique. Il y avait encore les Dario-Bario, justement classés parmi les plus aptes à savoir faire rire une si vaste assemblée. Le spectacle présenté " de haut " sur une estrade par le multi fantaisiste Natol qu'assistait le bon auguste Tony ne fut pas aussi prisé que l'espérait les organisateurs. Il faut reconnaître que, si bien agencé qu'il soit, avec ses bandes toilées bleues et blanches, le cadre n'était pas ad'hoc et que malgré le ombre d'artistes réunis auxquels s'ajoutèrent pour certains jours, des acrobates chinois, des sauteurs arabes et le fil de ferriste Hassan, les spectateurs regrettèrent un manque de variété dans les disciplines représentées: les grands cirques d'alors étaient des " cirques ménageries ". Or, il n'y avait pas de fauves, par exemple, et, en fait d'animaux, seulement deux éléphants !
Toutes ces réserves faites, ce " Cirque des Cirques " qui débuta en août 1937, a cependant sa place dans les événements qu'il convient de mémoriser, car son intégration dans une exposition internationale est une distinction marquante de l'histoire des jeux de la piste. C'était à ne pas oublier....
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