Monsieur de Buffon disait que le chat était un animal indomptable. Il aura ainsi fallu attendre " tout près d'un siècle la réparation de cette injure ", disait Hugues Le Roux dans son ouvrage " Les Jeux du Cirque " paru en 1889. Un siècle et l'arrivée une année plus tôt au " Cirque Rancy " du Professeur Eduard Bonnetty, un hollandais de vingt-huit ans qui, paraît il, dès sa naissance, démontrait un talent et une habileté uniques pour l'apprivoisement et le dressage des animaux. A dix-sept ans déjà, ce jeune homme présentait en liberté des lapins, des lièvres et des cobayes si savants que ses compatriotes en furent étonnés. Tenté par la difficulté rare, cet engouement lui donna l'idée d'éduquer avec patience des chats. Il fit alors choix de deux sujets hollandais comme lui, des chats de Hooren, réputés pour leur docilité, qu'il dressa durant des mois, leur adjoignant un élément de plus à la fois, pour atteindre le nombre de vingt au bout de quelque temps, les nouveaux sujets, l'instinct d'imitation aidant, s'instruisant plus rapidement que les premiers. Le premier exercice consistait à faire sauter le chat au commandement. Une fois ce travail obtenu, l'éducation devenait plus rapide. Les félins s'habituaient à marcher sur les dossiers de chaises, sur des goulots de bouteilles ou encore à franchir des cerceaux enflammés, etc...., mais il restait une épreuve décisive à franchir: celle de la présentation au public, et cela n'était pas forcément l'aspect la plus facile. Cette présentation était toujours des plus soignées et des plus pensées avec Monsieur Bonnetty. Comme Bidel qui introduisait un mouton dans la cage aux lions, Bonnetty voulut obliger ses chats à vivre en bonne intelligence avec des rats, des souris et des oiseaux. Ainsi, sur la corde tendue qui traversait le cirque, s'abattait un vol de sereins, hollandais eux aussi. Près d'eux, s'installaient des souris blanches et des rats gris pommelé. Le dresseur ouvrait alors la porte du palais des chats et, à la file, toute la bande d'artistes, Thiber, Jano, Moor, Edward, Paris, Brussel, Boulanger, Djeh, Brutus et César, défilait d'un pas lent, enjambant les rongeurs et les oiseaux dont quelques-uns s'envolaient et venaient se poser sur la tête des matous. Puis, les protégés du Professeur se mettaient à effectuer leurs exercices favoris. Certains étaient devenus au fil du temps de véritables vedettes. Ainsi, Brussel allait jusqu'à franchir quatorze chaises d'un seul bond, à une hauteur de un mètre cinquante.
Après les chats, Eduard Bonnetty se consacrera avec le même succès au dressage de chiens et de loups....
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