C'est bête une idée. Cela peut survenir à tout moment. Là, c'était en recherchant dans les archives de ce blog des articles concernant le thème de cette semaine qui s'achève que je suis tombé un peu par hasard, il faut bien le dire, sur deux d'entre eux, sans lien apparent évident, si ce n'est bien sûr le fait qu'ils évoquent des attractions insolites. C'est alors que m'est venue l'idée de les associer par le biais d'un mot, d'un seul mot.
Voici, tout d'abord, ce que je disais à propos de ces deux numéros et des artistes qui s'y rapportent, à savoir Martonn et Royus.
Au sujet de Martonn, j'écrivais le 28 janvier 2011 :
Ce fut en 1951 que Martonn, transformiste venu du music-hall, se fit remarqué chez " Napoléon Rancy ".
Martonn, qui terminait traditionnellement le spectacle, effectuait vingt deux transformations à vue et ce, tout en chantant, au point d'en perdre souvent la voix à la fin de sa prestation, le play-back n'existant pas encore à cette époque.
Martonn arrivait sur la piste en voiture, costumé en chauffeur. Il garait celle-ci l'arrière face à la gardine. La voiture éclatait en un grand éventail au milieu duquel était déployé un escalier duquel notre transformiste descendait habillé en femme. Il changeait donc ainsi vingt deux fois de costumes qui étaient tous superposés ( c'est dire que les jours de forte chaleur, l'attente en coulisse était souvent un véritable calvaire) et qui, à l'enlèvement, étaient " aspirés " par son épouse au travers d'une fente située dans l'éventail. On le voyait ainsi successivement porter le costume national italien (culotte courte, chemise rayée, cravate éclatante, petit bonnet dont le gland lui tombait sur l'oreille), puis chinois (long pantalon, kimono ample et chapeau plat), et hindou, avant qu'une bayadère n'évolue sur la piste. Une hollandaise remplaçait la précédente, tandis qu'une tyrolienne, une russe, une martiniquaise, une espagnole lui succédaient. Le public applaudissait ensuite Mistinguett, une girl, Cécile Sorel, un boy, un allemand, un chasseur d'hôtel, un cow-boy, un matelot, un sidi, un homme en habit dont celui-ci changeait quatre fois de couleur. Le compte y est : vingt deux changements, vingt deux costumes, vingt deux coiffures, vingt deux personnages différents. Le tout en quinze minutes et une heure trente de préparation avec une seule habilleuse, sa femme qui, soi dit en passant, fabriquait aussi les costumes.
A la fin de sa prestation, Martonn remontait l'escalier et disparaissait par le même éventail, à nouveau habillé en chauffeur au volant de son véhicule.
Martonn n'eût pas de successeur à son numéro, les temps évoluant vers des changements plus rapides, sans grande préparation, comme le fit par la suite " l'homme aux mille visages ", Arturo Bracchetti et bien d'autres.
A propos de Royus, voici ce que j'écrivais le 11 novembre 2011 :
En ce jour de commémoration, comment ne pas rendre hommage à un authentique militaire répondant au nom de Charles Gourdin (1868-1936), qui fut, de 1895 à 1911, tambour-major de la fameuse " Garde Républicaine ". Une fois l'heure de la retraite militaire sonnée, il se reconvertit sous le nom de Royus, en artiste de cirque et de music-hall et ce, sans jamais quitter son tambour. Et devinez quelle fut la première piste à l'accueillir ? Celle de Napoléon Rancy en 1911, où il présentait les " étapes du tambour français ", autrement dit des scènes de tambour à travers les âges, soit depuis le 17ème siècle jusqu'à 1910.
Charles Gourdin, alias Royus, fut une véritable légende de sa discipline. Et comme toute légende, il eût ses " fans " et aussi ses détracteurs.
Adulé par certains qui voyaient en lui un génie, il fallait effectivement lui reconnaître un certain talent, autant comme meneur d'hommes - il avait sous sa coupe plus de quarante hommes - que comme musicien et même compositeur, puisque plusieurs morceaux tels " La Marche Impériale ", " Le Réveil de la Garde " et surtout " La Marche d'Austerlitz ", restée célèbre, et qui a la particularité de se battre partie baguette sur la peau, partie sur le cercle du tambour et partie baguette contre baguette, sont à mettre à son actif. Au cirque et au music-hall, on le disait " virtuose tambour " ou " roi du tambour ", interprétant sans doute les mêmes airs que sous les ordres.
Ses détracteurs reprochaient à ce grand gaillard de " brailler " de son impossible voix de gorge voilée, assourdissant ainsi le public avec de trop savants roulements, comme pour mieux se venger de n'avoir pas d'organe. De plus, ils l'accusaient de n'avoir en réalité rien composé, mais simplement retranscrit à l'oreille des partitions anciennes issues des archives musicales de la " Garde Municipale de Paris ", recompositions qu'il avait lui-même déposées à la " SACEM ", et dont l'interprétation avait, dit-on, été agrémentée pour des raisons de musicalité.
Ainsi, si l'on peut encore entendre de nos jours, lors de cérémonies officielles notamment, des marches de Charles Gourdin, au cirque en revanche, à l'ère des bolas argentins, le temps de Royus est décidément bien loin.
Une petite anecdote à propos de Royus, pour conclure. Son vice était la passe anglaise, un jeu de dès que connaissent bien semble t'il, tous les joueurs d'argent. Il aimait la passe anglaise, mais... n'était pas aimé d'elle ! Vers la fin de sa carrière artistique, dans les coulisses du vieux " Casino de Montmartre " où il se produisait, il jouait d'abord tout son cachet d'une soirée, puis, perte après perte, s'endettait de toute la semaine à venir. Un personnage haut en couleurs donc que ce Charles Gourdin, alias Royus, haut en couleurs, dans tous les sens du terme.
Alors, avez-vous une idée du terme qui peut réunir ces deux articles ?
Le document de demain matin vous donnera indiscutablement un indice supplémentaire