Cette formule, titre quelque peu provocateur d'un article de presse " grand public ", résume parfaitement bien ce qu'a pu être la réaction des grands noms du cirque français, ce que j'appelle classiquement le " Club des Cinq ", et tout particulièrement des Rancy, lorsque jean Richard lança son cirque. Il faut dire que le comédien circophile, homme aux multiples casquettes, depuis le théâtre au cinéma en passant par la radio et la télévision, et j'en passe, bénéficiait d'une aura médiatique très importante, et la création d'un cirque à son nom avait effectivement de quoi inquiéter la profession. Jean Richard et les Rancy se connaissaient pourtant bien, et on peut même affirmer qu'il existait un respect mutuel, voire une relative bonne entente entre les deux, comme le montre cette photo issue de l'excellent ouvrage de Pierre Veyssilier paru l'an dernier et intitulé " 2 siècles de Cirque à Lyon ", photo sur laquelle on aperçoit Jean Richard et son amie Annie Cordy rendant visite au " Cirque Napoléon Rancy " en 1960.
Cette relative bonne entente exista déjà avant la création de l'établissement du célèbre comédien fou de cirque, mais aussi après, même si ces propos sont à tempérer quelque peu. Evidemment, il y eût parfois quelques frictions, rarement bien méchantes, durant les réunions du " Syndicat des Directeurs de Cirque ", Sabine Rancy et Jean Richard en ayant assuré la vice-présidence en 1975. Il y eût parfois des contrecarres, comme celle du Puy-en-Velay que j'ai déjà racontée ici à plusieurs reprises se terminant dans une atmosphère bon enfant. Sans doute, y eût il souvent un peu de jalousie entre les deux établissements. Bien sûr, quelques " prises de guerre " exacerbèrent la situation. Je pense notamment à celle de Michel Dupont, l'avant-courrier de Sabine Rancy, de 1965 à 1968, parti travailler pour la " Société des Spectacles Jean Richard ", ou encore au groupe toulousain " Larrieu-Bonnel " qui en assurait la régie publicitaire. Peut-être, aurait on aimé, lors de la " Fête des Tuileries " organisée en 1976 par Yves Mourousi, puis au moment de la crise de 1978, voir le nom de " Rancy ", certes émigré en Italie cette dernière année, associé à ceux de Jean Richard et de Bouglione dans cette fameuse " Association du Cirque Français ", association présidée par Christian Boner et censée sauver le " nouvel art majeur " dépendant désormais du ministère de la Culture et non plus de l'Agriculture et des Transports comme c'était le cas auparavant. Dans les deux cas, Sabine Rancy en avait été écartée, selon les uns, à moins qu'elle ne s'en était volontairement éloignée, comme le prétendent certains autres. Quoi qu'il en fut, je fais miennes les déclarations du chroniqueur historiographe du cirque, Paul Adrian, qui, dans les colonnes du numéro de " Scènes et Pistes " de juillet-août 1976, regrettait l'absence du nom de " Rancy " lors de la " Fête des Tuileries ", tout comme il le fera encore trois années plus tard à l'occasion du spectacle parisien commun ayant eu lieu du 8 juin au 1er juillet 1979, lesquels réunissait des numéros des cinq établissements que détenaient alors à eux seuls les Bouglione et Jean Richard :
Le même Adrian déplorait encore, dans un article de la revue dirigée par Manita Carrington, et ce, à juste titre d'ailleurs, la différence de traitement médiatique qui eût lieu l'année précédente entre les cessations d'activité des cirques de Jean Richard et celui de Sabine Rancy :
Jean Richard s'était bâti un véritable empire comprenant, outre l'établissement portant son nom, les cirques " Pinder " racheté aux Spiessert en 1972, l'" Hippodrome Galaxie " de la Porte de Pantin et le " Nouveau Cirque Jean Richard " créé en 1976, destiné aux cités qui ne pouvaient accueillir les deux précédents, lequel allait devenir " Médrano " en 1978. A cela, il fallait évidemment ajouter les parcs d'attractions que sont " La Mer de Sable ", toujours existante, et " La Vallée des Peaux Rouges " à Fleurines dans l'Oise. Paul Adrian réagissait d'ailleurs à cet empire :
En mai 1978, suite aux mauvaises affaires de " Médrano ", et sans doute aussi à une conjoncture difficile, il y eût donc un dépôt de bilan de la société que dirigeait le Commissaire Maigret et la création d'une nouvelle société se soldant par l'arrêt de l'exploitation de " Médrano " et la poursuite de l'activité des deux autres établissements itinérants jusqu'en 1983, année où une seconde faillite eût lieue, conduisant au rachat des actifs de la société par un certain Gilbert Edelstein, PDG de" Promogil ". Il faut reconnaître que le célèbre comédien avait peut-être vu les choses un peu en grand ou plutôt en trop grand et que, affaibli depuis son accident de mai 1973, il ne bénéficiait pas d'un entourage toujours à la hauteur de l'enjeu. Ceci est évidemment mon opinion personnelle qui n'engage que son auteur. Mais, il est évident que Jean Richard a tellement sublimé les arts du cirque au travers de ses spectacles que l'on ne peut bien entendu lui en vouloir Et puis, on le sait, la passion est souvent dévorante.....
Parmi toutes les casquettes du comédien, j'ai volontairement omis le zoo d'Ermenonville créé dans la propriété familiale en 1956 et fermé en 1991, un zoo qui, outre le " Cirque d'Eté " qu'il hébergeait et qui avait autrefois abrité des spectacles " rancyniens ", possédait un autre point commun avec les Rancy. Nous le verrons demain....