On lui donna tous les noms, des plus glorieux aux plus infamants.... Pour les uns, il était " le roi du Caf'Conc " ou " le chanteur infatigable ", capable d'interpréter jusqu'à vingt-cinq chansons en une seule soirée; pour d'autres, il n'était qu'un " chanteur à la voix criarde " ou encore le " chanteur au trop grand train de vie ", pouvant dépenser jusqu'à soixante mille francs de l'époque par journée. Cette époque, ce fut précisément la seconde moitié du 19ème siècle et le tout début du 20ème. Né dans les Landes en 1845, Paulus, de son vrai nom Jean-Paulin Habans, n'avait que neuf ans lorsqu'il perdit son père. Remarqué pour sa voix dès sa scolarité chez les Frères dont il participa à la maîtrise, il est toutefois rapidement expulsé de son collège en raison de son comportement. Paulus entra alors rapidement dans la vie active, dans des bureaux tout d'abord. Ce fut une rencontre avec un certain Lansade, un artiste de second ordre, qu'il accompagnera dans ses tournées, que sa carrière de chanteur débuta véritablement. Mais le succès n'était pas au rendez-vous pour Lansade, et Jean-Paulin se retrouva ainsi sans le sou à Paris où il trouva un emploi chez un fabricant de lampes, puis chez un cafetier où il officiera trois fois par semaine, exerçant son talent dans des goguettes les autres jours. Ce fut en avril 1868 qu'il entama à l'" Eldorado " sa carrière professionnelle de chanteur. Ses débuts sont qualifiés de " piteux ", et au bout d'un mois, il est remercié pour" insuffisance ". Paulus partit alors pour Toulouse au " Jardin Oriental " où il créa " Les Pompiers de Nanterre ", son premier grand succès. Il passa ensuite par Marseille puis Lyon, et puis à nouveau Toulouse et le " Jardin Oriental ", invité par Monsieur Lassaigne, son directeur, dont il deviendra d'ailleurs le mari de la fille. Le " Casino de Lyon " pour la saison 1869-1870 pour six-cent francs par mois, puis le " Casino d'Eté " de Nîmes, avant un retour à l'" Eldorado " entre 1871 à 1878, histoire d'y prendre une revanche sur son premier passage. et puis Marseille, la " Scala " de Paris, Marseille une fois de plus à l'"Alcazar ", et Nîmes, Toulon, Montpellier, Bruxelles, l'Espagne, le Portugal, etc.... seront quelques villes et pays et quelques scènes correspondantes où l'artiste se produira. Les appointements du chanteur lui permirent de mener, disais-je, un grand train de vie. Acquérant ainsi une maison à la naissance de chacun de ses enfants, Paulus achètera aussi l'Eldorado " de Nice en 1889, qu'il revendra trois années plus tard à perte, dégoûté de son tenancier, puis le " Bataclan " après trois années de fermeture, après une tournée fructueuse de 1890 à 1892 qui le mènera en Europe Centrale, en Russie, à Londres, à Paris et surtout aux Etats unis d'où il reviendra riche et célèbre. En ce lieu, l'idole montera une troupe nombreuse et talentueuse, composée de Mercadier, d'Aristide Bruant, de Paul Delmet, de Henry Fersy. De nombreuses petites comédies, opérettes et surtout des revues clôturaient chacun des spectacles. Le chansonnier Léon Garnier, parolier favori de Paulus et auteur de la plupart des oeuvres du chanteur, telles ", était le directeur de l'établissement, un établissement dont les débuts fructueux ne dureront pas. Mal conseillé dans ses affaires, Paulus avouera plus tard dans ses mémoires: " j'embrassais trop d'affaires et je les étreignais mal forcément....". Son argent avait littéralement fondu, il décevait son public par ses absences. De plus, à ces ennuis financiers, s'ajoutèrent des soucis familiaux, le chanteur se séparant de son épouse que l'on retrouvera aux côtés de son ami Mercadier, lui réclamant après le divorce une pension alimentaire de 400 francs qu'il ne pouvait se permettre de donner vu la disette qu'il connaissait et ce, d'autant plus qu'il ne paraissait plus en scène que par intermittence. C'est ainsi qu'on aura l'occasion de l'applaudir à Paris pour l'Exposition en remplacement dYvette Guilbert, souffrante, ou encore en 1903 où Paulus se produira sur la scène du " Music-Hall Gallici-Rancy ", raison d'être de l'évocation du chanteur infatigable et au trop grand train dans la " Mémoire des Rancy "....
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