Dans le numéro de Gino Donati, il y avait donc un piano et aussi du " bel canto ".
Dans un autre registre, un peu plus sérieux ou plutôt moins comique, Jean Houcke présenta à Amiens un autre chanteur accompagné au piano, un certain André Marnier, et c'est une évocation inédite :
André Marnier était, en réalité, le sosie parfait de Maurice Chevalier dont il interprétait le répertoire. C'est ce qu'il fit en juillet 1936, sur la piste du " Cirque Jean Houcke " traditionnellement installé dans l'établissement fixe de la place Longueville, où, accompagné au piano par René Ruet, premier prix de conservatoire de la capitale picarde, lequel était aussi le chef d'orchestre de l'établissement, il recueillit un beau succès auprès du public, un succès que l'on disait même plus grand que celui qui fut réservé douze ans plus tôt au célèbre chanteur.
Comme on peut le voir, le chant et la présence de chanteuses et chanteurs sur une piste de cirque ne datent pas d'aujourd'hui tandis qu'on les plébiscite après les avoir longtemps décriés. Des " Monsieur Loyal " poussant la chansonnette, des numéros d'excentricités musicales, des attractions accompagnées de voix " en live " ou parfois enregistrées, y compris animalières, l'introduction d'une chanteuse au sein de l'orchestre intervenant tout au long du spectacle sont aujourd'hui monnaie courante pour ne pas dire de plus en fréquentes. Au temps des Rancy, et plus encore chez les Houcke, certains numéros bénéficiaient d'un accompagnement musical et vocal - je pense tout particulièrement aux prestations équestres, mais pas que - tout comme les pantomimes qui étaient parfois chantées. Et que dire des célébrités du " caf'conc " ou des variétés qui se produisaient en personne sur leurs pistes, à l'instar de Mayol ou Fragson pour les Rancy, et donc de Maurice Chevalier, en ce qui concerne les Houcke, ainsi que je le rappelais dans cet article du 23 août 2020 :
On connait l'attrait qu'avait le grand Maurice Chevalier pour le cirque et tous les circophiles ont encore en mémoire cette photographie d'un programme " Bouglione " montrant le chanteur en compagnie des quatre célèbres frères au
" Cirque d'Hiver " ou cette autre le montrant au baptême d'un éléphanteau du " Cirque Amar " en compagnie de Joséphine Baker. Rien d'étonnant donc à ce que le célèbre chanteur se produise un jour sur une piste dès que l'occasion lui en serait donnée. Et cette occasion lui fut offerte par Jean Houcke à Amiens pour la saison d'été 1924 de son établissement. Les choses ne furent pourtant pas si simples que cela. On peut même parler de démêlées. Jugez-en plutôt.... Quand Maurice Chevalier arriva dans la capitale picarde, il déclara tout net qu'un artiste comme lui ne pouvait chanter sur une piste. Aussi exigea t'il qu'une petite estrade soit montée et que, derrière celle-ci, une tenture soit installée afin de donner l'illusion d'un décor. Et quand l'estrade et la tenture furent mises en place, le chanteur exigea quelques musiciens afin d'avoir cette fois, l'impression d'un orchestre. C'est alors que l'interprète de " Paris sera toujours Paris " ou de " ça sent si bon la France " consentit à paraître devant le public en compagnie de Mademoiselle Yvonne Vallée qui effectuait avec lui quelques petits pas de danse, pour produire son tour de chant entre deux numéros de cirque et ce pour la modique somme de 3000 francs par représentation. On raconte que le succès ne fut pas au rendez-vous, au grand damne du chanteur mais aussi de Jean Houcke qui pouvait s'arracher les derniers cheveux qui lui restaient, bien loin de penser que " dans la vie, il ne fallait pas s'en faire "....
Les chanteurs sur les pistes " rancyniennes " ou " houckiennes ".... Voilà qui aurait pu être un thème pour la nouvelle semaine qui se profile, mais ce ne sera pas le cas même si c'est le chant qui sera encore honoré....