" A comme Amar ".... C'était le tout premier article de la " Mémoire des Rancy ".
Curieux d'ailleurs de commencer un " dictionnaire des Rancy " par le nom d'" Amar ", mais voilà, ce sont les hasards de l'alphabet.
Des quatre autres membres du " club des cinq ", c'est certainement " Amar " qui eût le plus de relations avec " Rancy ", des relations professionnelles d'abord, voire amicales, parfois conflictuelles, mais aussi tout simplement confraternelles. J'ai déjà évoqué dans mon livre sur " Le Cirque Sabine Rancy ", comment les deux noms se sont souvent retrouvés à la croisée des chemins. Celle-ci a atteint son paroxysme en 1974, lorsque Schériff Amar, le plus jeune et le plus rebelle des quatre célèbres frères, fut engagé par Sabine Rancy pour y présenter son entrée de cage de dix lions en férocité. En septembre, un journaliste du " Figaro " vit le cirque à Céret dans les Pyrénées Orientales et n'en crut pas ses yeux, comme il en fit part aux lecteurs dans le grand quotidien : " Tout d'abord un vieux monsieur vêtu d'un costume gris clair et coiffé d'un feutre de même couleur entre dans la cage aux lions. J'ai bien cru qu'il s'agissait de l'un de ces " barons " qui se détachent parfois du public pour venir défier un artiste sur la piste et se signalent par des exploits surprenants. Pas du tout ! Le vieux monsieur n'était autre que le dompteur Amar, un des doyens issus de la célèbre famille, et l'on ne pouvait lui contester le droit de préférer la tenue de ville à l'habituel uniforme du belluaire. Il ajoutait ainsi aux difficultés, car faire évoluer des fauves avec un chapeau sur la tête, ce ne doit pas être commode ".
Shériff Amar n'arriva que quelques jours après le départ de la tournée qui eût lieu d'Amiens cette année-là. Alors âgé de 72 ans, il avait certes perdu de sa superbe, mais gardait une certaine autorité face à des lions toutefois vieillissants. Il arrivait tout droit d'Algérie, où il avait dirigé durant neuf ans le " Cirque National Algérien ", et avait emmené, entre autres, dans ses bagages, un énorme chimpanzé, qu'il faisait d'ailleurs passer pour un gorille, et aussi une jeune élève, prénommée Denise, qu'il voyait lui succéder à la tête de ses fauves, mais celle-ci accumulait les gaffes et sa carrière au cirque s'arrêta bien rapidement. Le " Cirque Sabine Rancy " fut, je pense, la dernière apparition en piste du grand Shériff Amar qui devait s'éteindre seulement deux années plus tard, en 1976. 1974 ne fut, en fait, pas la seule année où l'on pu applaudir le cadet des Frères Amar. Déjà, durant le séjour bordelais de mars 1935, celui qu'on appelait alors " Amar jeune " avait présenté ses lions de l'Atlas, chez " André Rancy " dans un établissement dont il suffisait de gratter le nom pour trouver celui d'" Amar ". Il était alors accompagné de ses trois frères, Mustapha qui faisait évoluer les tigres géants, Ali avec ses ours blancs, et puis, bien sûr, " Amar aîné " et son fameux troupeau de seize éléphants lequel fera également une apparition chez " Jean Houcke " à Amiens en juillet 1942. Il est à noter que cette même année 1935, Tilly et Henry Rancy, qui ne tournaient plus avec leur cirque, furent engagés, pour une partie de la saison, au " Cirque Amar ".
Professionnelles, disais je, ces relations entre " Amar " et " Rancy " devinrent presque amicales, lorsqu'en 1937, Ahmed Amar engagea Albert Rancy comme avant-courrier de son établissement, rôle qu'il tint jusqu'en avril 1942. En 1941, Albert Rancy, ainsi d'ailleurs que André, mais beaucoup plus furtivement, seront même les vedettes du spectacle du " Nouveau Cirque de Paris " que Ahmed co-dirigeait alors avec son frère Schériff. L'année suivante, à Roubaix et dans quelques autres villes de France possédant un établissement fixe étant donné le contexte belliqueux, on verra même un cirque " Rancy Amar " ou " Amar Rancy ", selon les cités suivant que l'un ou l'autre nom était plus connu dans celles-ci.
Professionnelles et amicales, elles le furent autant quand, l'année suivante, le même Albert Rancy, désormais directeur du " Nouveau Cirque des Champs-Elysées ", accepta d'héberger et de produire sur sa piste le temps du conflit mondial, plusieurs attractions animalières d'" Amar ", dont les éléphants et les fauves, cette fois dressés par le grand Victor Saulevitch.
Conflictuelles, les relations le devinrent lorsque une fois la guerre achevée, Albert Rancy décida de relancer sur les routes son propre établissement itinérant, déclinant pour l'occasion une offre des Frères Amar de repartir avec eux. Il est vrai que le " Cirque Albert Rancy " et son chapiteau à quatre mâts " au carré ", flambant neuf, devenait alors un " concurrent " direct du " Cirque Amar ". Contrecarre sur contrecarre, Ahmed, Ali et Mustapha eurent raison du " Cirque Albert Rancy " après seulement quelques semaines de tournée, le conduisant à la faillite et se payant même le luxe d'en racheter le matériel. Malgré cela, en 1947, André Rancy, frère d'Albert, connaîtra un nouvel engagement au " Cirque Amar ". Autre contrecarre, mais n'ayant pas la même issue, ce fut à Lille en 1949, lorsqu'au moment de la foire aux manèges de septembre, le " Cirque Napoléon Rancy ", cette fois, un habitué de l'événement, et le " Cirque Amar " s'installèrent à quelques dizaines de mètres l'un de l'autre, mais l'avantage tourna plutôt en faveur des Rancy, si chers dans le coeur des lillois.
Confraternelles enfin, les relations le furent à nouveau en 1955 lorsque Mustapha remit sous son chapiteau installé à Toulouse, un " Oscar du Cirque " à Dany Renz pour son fameux " Robin des Bois "....
Comme on peut le constater, les liens entre les Amar et les Rancy ne furent pas un long fleuve tranquille, c'est le moins que l'on puisse dire.
Je ne peux m'empêcher, pour conclure, de citer l'existence de cet exceptionnel " Cirque Amar - Rancy - Carrington - Zoo Jean Richard ", vu d'une façon très éphémère en Nord-Pas-de-Calais Picardie en 1985, et dirigé par James et Brigitte Carrington. A nom compliqué, explication simple.... Cette année-là, James Carrington louait à Firmin Bouglione l'enseigne " Amar " à laquelle il avait adjoint le nom de " Carrington ". Dans le Nord de la France, où il avait connu un certain succès avec " Rancy " qui lui appartenait toujours, il ajouta ce dernier à " Amar " et " Carrington ", et comme, entre " Rancy " et " Amar ", il exploita aussi l'enseigne " Jean Richard " louée à Gilbert Edelstein avec qui les affaires ne s'étaient pas forcément bien terminées, il demanda l'autorisation au comédien d'utiliser la raison sociale " Zoo Jean Richard "....
Nom. A comme Amar : des liens confraternels et conflictuels à la fois avec les Rancy (5 janvier 2010)
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